Concentrations : le projet de rachat de Transat par Air Canada dans le viseur de la Commission européenne

Europe
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Le 25 mai 2020, la Commission européenne a décidé d’ouvrir une enquête approfondie sur le rachat de Transat par Air Canada au regard du règlement de l'UE sur les concentrations. La Commission craint que l’acquisition en question ne réduise la concurrence dans le secteur du transport aérien civil entre l'Espace économique européen (EEE) et le Canada. Une décision finale de la Commission est attendue pour le 30 septembre 2020.

Le projet de rachat de Transat par sa compatriote Air Canada, qui avait été approuvé au mois d’août 2019 par les actionnaires pour un montant total de 720 millions de dollars canadiens (485 millions d'EUR), pose sans trop de surprises un problème aux autorités de concurrence européennes et canadiennes. En effet, après le Bureau de la concurrence du Canada, qui a déjà donné un avis négatif à la concentration entre Transat et Air Canada en mars, c’est la Commission européenne qui a décidé d’ouvrir une enquête approfondie sur ce projet de concentration.

Rappelons que le règlement (CE) n° 139/2004 du Conseil du 20 janvier 2004 relatif au contrôle des concentrations soumet les projets de concentration de dimension européenne à une procédure de notification préalable à la Commission européenne. Celle-ci autorise les projets qui n'entravent pas de manière significative une concurrence effective, notamment en créant ou en renforçant une position dominante. Pour rappel, dans le secteur du transport aérien, la Commission examine l’impact d’une concentration route par route.

Les deux compagnies aériennes canadiennes, Air Canada et Ait Transat, sont respectivement numéro un et deux du transport de passagers aériens entre l'Europe et le Canada. La Commission européenne a constaté dans la phase préliminaire de la procédure de notification que les activités de ces sociétés étaient largement complémentaires et qu’elles étaient historiquement des concurrentes « frontales » sur la majorité des routes aériennes Canada-EEE.

Selon l’enquête préliminaire de la Commission, la concurrence pourrait s’amenuiser sur 33 paires de villes d'origine et de destination entre l'EEE et le Canada, dont 29 villes d'origine et de destination pour lesquelles les deux compagnies proposent des services directs et quatre pour lesquelles l'une d'elles propose des vols directs et l'autre des vols indirects par l'intermédiaire de l'un de ses aéroports pivots.

La Commission a relevé qu’en 2013, Air Canada avait lancé sa filiale Air Canada Rouge pour se frayer une place sur le marché des voyages d’agrément à bas coût entre le Canada et l’EEE, entrant en concurrence directe avec Transat alors que les compagnies européennes opéraient uniquement sur ces routes de manière limitée et qu’elles restaient par conséquent des concurrentes marginales.

Ainsi, la Commission est d’avis, à ce stade de la procédure, que la compagnie WestJet, également présente sur le marché des liaisons aériennes Canada-EEE, ne peut exercer une pression concurrentielle suffisante sur l'entité issue de la concentration pour les routes aériennes concernées.

Sur la base des informations dont elle dispose à l’issue de la première phase de l'enquête, la Commission a estimé ne pas être en mesure de déterminer si, à long terme, ces compagnies continueraient à se faire concurrence sur toutes les liaisons où elles étaient concurrentes avant la crise. Quoi qu'il en soit, elle estime à titre préliminaire qu'Air Canada et Transat restent les concurrentes potentielles les plus proches pour les liaisons EEE-Canada en général et pour les paires de villes d'origine et de destination examinées par la Commission en particulier.

La phase II permettra aux parties de présenter les informations nécessaires à la Commission, voire une proposition d’engagements visant à faire disparaître ses craintes. Ces engagements peuvent porter sur le retrait de certaines routes, voire l’abandon de slots aux aéroports concernés. La décision finale de la Commission devra être rendue le 30 septembre 2020.